• Un an plus tard...

    Bonjour ! Eh oui, c'est Gribouille qui vous écrit. Enfin, pas vraiment, mais vous le saviez déjà. Dans le dernier article, ma maman humaine vous avait annoncé ma disparition, et... eh bien, je ne suis toujours pas rentré à la maison. Elle a vraiment beaucoup cherché, continué à reporter ma disparition à la SPA tellement de fois que les refuges doivent la haïr, refait publier les alertes me concernant sur Facebook, sans résultat. Ça fait aujourd'hui tout juste un an que j'ai disparu, et elle espère vraiment que j'aille bien, où que je sois. Même si elle n'y croit pas trop.

    En vérité, même si elle espère de tout son être le contraire, elle pense que je suis sans doute mort. Les chats font souvent ça; ils s'en vont aussi loin que possible de leur maison quand ils sentent qu'ils vont mourir. Les gens pensent souvent que c'est pour que leurs propriétaires ne les retrouvent pas, en fait il s'agit juste d'un instinct de conservation de l'espèce. Si un chat mourait près de l'endroit où vit sa famille (une famille chat, sauvage, je veux dire), les prédateurs le sentiraient et pourraient s'en prendre aux siens. Donc on s'en va aussi loin qu'on peut pour éviter ça, même si on n'est pas sauvage et que nos humains ne craignent pas grand-chose.

    Elle s'en veut beaucoup, en fait. Je ne sais plus si je vous l'ai raconté (ni si elle l'a fait pour moi), mais je n'étais vraiment pas bien depuis plusieurs mois avant de disparaître. J'allais mal, donc elle m'avait emmené chez le vétérinaire qui lui avait dit que j'avais sans doute des vers, de me donner un vermifuge et de revenir le voir deux mois plus tard si ça n'allait pas mieux. Elle a franchement essayé de lui faire comprendre que ça n'était pas ça (j'en avais déjà eu, des vers, et mes copains chats aussi, donc elle savait très bien que ça n'avait rien à voir), elle a essayé de lui faire me faire une prise de sang, un minimum d'analyses, parce qu'elle savait que le problème était ailleurs. Mais il n'a pas voulu l'écouter.

    Ça, c'était début juillet. Pendant tout l'été, je me suis amaigri petit à petit, sans qu'elle ne le remarque vraiment puisque c'était très progressif et qu'elle me voyait tous les jours. Ce n'est qu'en regardant des photos de moi à cette époque qu'elle se rend compte à quel point j'étais maigre et qu'elle aurait dû s'inquiéter bien plus, bien plus tôt. Pourtant je mangeais plutôt normalement (la plupart du temps), et je dormais quasiment toute la journée au lieu de jouer dehors - même quand j'allais dehors, je ne faisais pratiquement que dormir. J'étais vraiment mal, mais elle faisait confiance au vétérinaire, se disait que si je pouvais avoir quelque chose de grave, alors il m'aurait fait des examens, et que s'il l'avait juste renvoyée à la maison avec un vermifuge, ça ne pouvait pas être trop grave.

    Sauf que ça l'était.

    Deux mois plus tard, à la seconde près, nous revoilà chez le vétérinaire pour lui dire que le vermifuge n'a absolument rien changé (étonnamment, hein). Il a dit qu'il allait me faire une prise de sang et une radio, et qu'il faudrait devenir une semaine plus tard pour ça (il me semble que c'était un mercredi), en m'ayant laissé à jeun depuis la veille au soir. Ma maman n'était pas trop d'accord d'attendre une semaine, mais qu'est-ce qu'elle aurait bien pu faire ? S'il lui donnait rendez-vous à cette date et pas avant, c'était comme ça. Et c'était tout.

    Sauf que finalement on n'a pas attendu le mercredi suivant. Parce que le samedi matin, je me suis mis à vomir plusieurs fois, principalement de l'air. Je n'avais pas mangé ni bu de toute la matinée, peut-être même de la nuit. Ma maman a téléphoné au vétérinaire en panique (vomir plusieurs fois de suite et l'estomac vide, ça n'est pas normal pour un chat, à moins qu'il n'ait la gastro, qui est très dangereuse pour nous), mais il n'a pas répondu. Elle lui a laissé un message probablement très brouillon et d'un voix vraiment tremblotante et a contacté une clinique vétérinaire, dans une autre ville (mais à peu près à la même distance que le vétérinaire habituel) pour prendre rendez-vous très rapidement chez eux. La dame au téléphone semblait vraiment gentille et maman était rassurée d'avoir rendez-vous là-bas dans une heure et demie, elle s'attendait à plus long.

    D'ailleurs c'est là qu'elle va désormais avec mes copains chats. Si elle avait su, elle aurait clairement été là pour moi aussi... Si elle pouvait revenir en arrière, elle le ferait sans hésiter.

    Sauf que le vétérinaire habituel a rappelé maman pour lui dire qu'il pouvait la voir en urgence dans vingt minutes (le temps de se rendre à son cabinet). Et maman a hésité. Elle a dû faire un choix. Et elle regrettera toute sa vie d'avoir annulé la clinique pour aller chez l'incompétent habituel (en qui elle avait encore confiance). Il m'a gardé pour le week-end, m'a mis à jeun et fait les examens dont il avait parlé. Maman a pu me récupérer le lundi, et ensuite il a fallu attendre les résultats. Maman a téléphoné plusieurs fois, 2-3 fois par semaine, pour savoir s'il les avait, et elle a bien fait: finalement, deux semaines plus tard, il s'est rendu compte qu'il les avait depuis un moment, qu'ils étaient inquiétants et qu'il avait juste oublié de l'appeler. WTF.

    Maman était vraiment fâchée d'entendre ça, surtout qu'il n'en avait clairement rien à foutre, mais elle était encore plus inquiète pour moi alors elle a mis tout ça de côté dans sa tête et est allée écouter les nouvelles me concernant. J'avais en fait une pancréatite, qui était évidemment devenue très grave après plus de deux mois (le vétérinaire incompétent a limite traité maman de mauvaise maîtresse parce qu'elle "n'avait pas essayé de m'aider plus tôt", alors que c'est lui qui avait refusé de faire les analyses !). Une pancréatite, c'est une inflammation du pancréas. C'est vraiment grave et ça peut être mortel pour les chats, ou devenir chronique si ça n'est pas pris à temps. Et ça les fait atrocement souffrir, bien entendu.

    Quand maman y repense, au fait que j'ai sûrement souffert le martyr pendant ces fichus deux mois (et quelques semaines), elle s'en veut tellement. Elle sait que ce n'est pas vraiment de sa faute, qu'elle a fait tout ce qu'elle a pu pour convaincre cet abruti de me faire les analyses qui auraient pu m'aider bien plus tôt, mais elle s'en veut quand même. Elle se dit qu'elle aurait dû consulter quelqu'un d'autre dès l'instant où elle a senti qu'il n'était pas impliqué ni digne de confiance, mais on avait l'habitude d'aller à ce cabinet et ça s'était toujours bien passé (sauf qu'à cette époque, il avait une employée qui faisait les consultations à sa place, et qui elle, était compétente...).

    Du coup, une fois les résultats annoncés, le vétérinaire rend son verdict; on peut me sauver, mais pour ça il faut me faire un "flush" du pancréas. C'est-à-dire ouvrir mon pancréas en deux et aller le nettoyer manuellement pour éliminer l'inflammation. C'est une opération lourde, évidemment, alors maman est inquiète pour le prix (elle ne roule clairement pas sur l'or). Il lui annonce environ 90€ pour l'opération, ce qui la soulage: elle va pouvoir me sauver.

    Finalement l'opération lui aura coûté plus de 400€ en tout, et elle est convaincue que cet abruti fini lui a fait payer deux fois la même facture (mais que voulez-vous, quand on vous maintient que "non non, c'est le même montant au centime près pour des prestations complètement différentes, mais c'est juste une coïncidence lol c'est pas la même facture et puis t'façons si tu paies pas je t'envoie des huissiers", ... y'a pas trop le choix). Elle pense également qu'il lui a fait payer les analyses d'autres chats que moi, parce que le laboratoire d'analyses vétérinaire n'arrêtait pas de lui envoyer une facture d'une centaine d'euros à un nom qui n'était pas le sien, en maintenant que c'était "le docteur Vétérinaire-Incompétent qui leur avait transmis le nom" et blah blah blah. Bref, il lui a annoncé le mauvais prix et l'a sans doute bien roulée, ce sale... rat.

    Sauf que finalement, même après l'opération, je ne vais pas tellement mieux. Le vétérinaire dit que je peux ressortir directement (en plein automne/début d'hiver), mais elle trouve ça bizarre et préfère me garder enfermé au moins une semaine pour être sûre - comme pour les stérilisations des minettes, en fait, puisque dans les deux cas le chat est ouvert, elle s'est dit que ça serait sans doute mieux. Apparemment il ne faut pas prévoir de retirer mes fils, ils sont censés tomber quand je n'en ai plus besoin. Il ne dit pas à maman qu'il faut surveiller l'aspect de ma cicatrice ni ce qui est normal ou pas (comme par exemple, si c'est normal qu'elle soit un peu rouge, ou que la peau gonfle un peu (ça l'est)), ce qui ajoute encore à son incompétence.

    Je me contentais d'errer entre la litière, le coin nourriture et divers endroits douillets pour dormir, je râle et grogne quand maman veut me caresser. Je ne veux plus dormir dans sa chambre, alors qu'avant je dormais toujours blotti contre son ventre. Elle trouve ça bizarre, mais se dit que je dois avoir encore mal à cause de l'opération, que je ne suis pas encore tout à fait remis et qu'un changement de comportement est relativement normal dans ce genre de cas (elle aussi aurait été grincheuse si on l'avait ouverte en deux).

    Puis, un peu plus d'une semaine après l'opération, je demande à sortir. Le mercredi 19 octobre au matin, plus exactement. Elle est un peu pressée ce jour-là; elle n'avait vraiment pas envie de sortir de son lit pour aller en formation, ce qui ne lui était jusque là pas encore arrivé (pressentiment ?), donc elle est un peu en retard. Elle est contente et soulagée de voir que je veux sortir, elle se dit que je dois me sentir mieux et avoir envie d'aller jouer, enfin ! Elle me fait une petite caresse vite-fait, peut-être même un câlin, je ne suis plus très sûr. Elle m'ouvre la porte. Et elle ne me revoit plus jamais.

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